mardi 15 septembre 2020

Journal d'avant 40 - 15

Journal d’avant 40 -15

Alors oui je vieillis mais j’avoue avoir eu de la chance de ne souffrir d’aucune infirmité notable et médicalement identifiable jusqu’à présent. On est tous infirme quelque part mais pour ne pas faire de la sentimentalité de bas étage, il n’est rien d’avoir des états d’âme versus une réelle infirmité. Surtout en temps de Covid, j’y pense assez souvent depuis le port du masque obligatoire.

Les sourds qui ont réussi à développer la capacité de lire sur les lèvres pour une vie plus normale que de ne comprendre que ceux qui savent signer, et bah ils ont tout de même été bien oubliés. Cela doit déjà être bien délicat de comprendre des parlants sans les entendre, alors là à part ceux qui ont des visières plastiques il n’y a aucune chance.

Et autre handicap même s’il paraît plus anodin et de fait plus léger, le daltonisme peut avoir des conséquences désastreuses en ce temps où toutes les régions d’Europe se voient attribués par tous les pays ce même code couleur vert, orange et rouge. Quoi de plus délicat pour le daltonien dans ce cas. Imaginons pas de bol un daltonien sourd se faire arrêter par un policier masqué lui montrant du doigt une carte avec les départements français, le daltonien ne pouvant identifier de quel endroit il convient mieux de prétendre venir et donc ne tombant forcément pas sur un des deux seuls départements verts de France. Le voici donc aux arrêts, avec, vue la gentillesse de nos amis policiers, un refus d’obtempérer, même pas perçu, les quasi insultes étant vociférées derrière le masque. Le voici donc aux arrêts, et ces policiers voyant le pauvre homme refusant de parler se disent que c’est forcément un dur. Et le voici jouet des coups de matraque : « Mais tu vas parler sale merde » et bam ça tape, ça injurie, ça se défoule, ça prend du plaisir du côté des troupiers de la nouvelle terreur. Notre pauvre homme finit inconscient, le rapport de l’inspection générale en trouvera clairement la raison et mentionnera que l’homme s’est relevé trop précipitamment de sa chaise se cognant une vingtaine de fois contre le coin de la table. Cet homme sera donc comptabilisé dans les agressions de policiers, les refus d’obtempérer, les déments, et les porteurs du Covid. On le contera trois fois, car trois policiers étaient présents, car ce qui compte c’est le chiffre.

Une fois à l’hôpital l’homme qui aura perdu l’usage de ses mains, sacré coin de table quand même, sera mis dans la catégorie déments. Pour ne pas faire de bavure ses papiers auront été égarés par les policiers. Il sera donc mis dans un asile et lui de ne choisir qu’à se comporter comme les autres comme un fou pour être traité avec plus de normalité.

Ce petit délire pour souligner que lors de crises humaines et sociales de la sorte, les plus touchés sont les porteurs de handicap, physique, mental, social, économique. Aucun homme politique n’en parle, ils doivent marcher ou crever, le plus important c’est comptabiliser le nombre de cas, imposer des contraintes, traiter les gens comme du bétail, sans humanité. Cela rappelle hélas tout de même de très mauvais souvenirs à ceux qui connaissent un peu l’histoire du 20ème siècle notamment. Il y eut l’abandon des personnes en maisons de repos, qui fut clair et identifié mais qui finalement n’a pas suscité beaucoup plus de réactions, les politiques laissant couler et attendant. Et concernant cet abandon, voir la maltraitance des minorités en difficulté, pas un mot, Travail, Masque et Respect absolu de l’Etat, voici un beau triptyque.

Sur ce à démain.

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