mardi 28 juin 2011

De la tradition que c’est bon - un soir chez Bocuse

Un périple lyonnais m’a amené chez le fameux Paul Bocuse. Parachevant un itinéraire de 9 étoiles, ce clou du spectacle gastronomique s’annonçait mythique certes, mais les réserves de certaines personnes y étant allé récemment m’avaient mis sur la (fausse) piste d’un restaurant ne devant ses trois étoiles qu’à son passé et à l’éminence qui la dirige toujours. Et bien même si j’ai compris qu’il puisse être émis quelques réserves sur l’un ou l’autre point, il s’agit bien d’un endroit magique dans lequel on se laisse entraîner avec joie, les papilles s’épanouissant et la gourmandise prenant le dessus.
Le cadre extrêmement chargé, la cuisine en face de l’entrée et de l’escalier dont on entrevoit les cols bleu blanc rouge au milieu des cuivres imposants, ainsi que le nombre d’employés pharaonique impressionnent. Dans certains restaurants on a vite l’impression d’être comme à la maison, là pas du tout, on est bien chez Paul Bocuse, les services, les couverts, tout est imprégné de cette légende vivante. Ne comptons pas sur les limites potentielles que voudraient nous imposer notre estomac nous nous lançons dans le menu grande tradition. La fameuse et médiatique Soupe aux truffes VGE finissant de nous convaincre. Le premier plat, une grosse sensation, comme diraient certains critiques, on est sur une cuisine extrêmement gourmande. L’escalope de foie gras de canard poêlée au verjus est sublime, un fondant, une douceur, miam, ça me fait encore saliver. Certes les critiques pourraient dire qu’il n’y a rien de spécial dans ce plat, que le foie gras poêlée c’est vu et revu, et alors ! Si c’est bon, si c’est dans un certain sens la source d’un style, pourquoi changer.

Certains cuisiniers parient sur l’évolution, en ce qui concerne Bocuse on est sans doute plus sur un type d’ACDC de la grande cuisine, après avoir défini les bases toujours le même style depuis 40 ans (et plus pour Bocuse) mais c’est tellement bon. La soupe aux truffes VGE était une vraie surprise gustative n’ayant jamais eu l’occasion de gouter ce type de soupe puissante et recouverte d’une pâte feuilletée. Alors qu’y a-t-il dedans, pas évident de tout deviner, foie de veau ou foie gras ? Nous resterons avec mon ami chacun sur nos points de vue. Pour la truffe noire, pas de doute, on la sent, ce qui permit la plus belle association avec le Côte Rotie de chez Jamet. Un vrai régal. Evidemment ceux qui aiment manger une feuille de salade et quelques petits légumes à l’huile d’olive quand il fait plus de 25° dehors devront repasser en hiver. La sole avec ce beurre blanc légèrement grillé à la salamandre un régal jusqu’à n’en plus laisser une goûte de sauce même si j’avais conscience d’avoir déjà englouti ma botte de beurre. Pour le diététique on repassera aussi. A ce stade la faim vous quitte, mais l’enchantement continu. La volaille de Bresse cuite en vessie captive dès son arrivée, tel un ovni ovoïde au milieu des plats d’argent. C’est peut-être ici que le ravissement gustatif fut moindre, mais c’est sans doute en partie du au fait qu’estomac et palais ne sont plus habitués à tant manger. Cependant un accompagnement de sauce aux morilles sublimes, des petits légumes à la perfection et une viande ferme et savoureuse.
La fin n’est sans doute pas ce qui m’a laissé le plus gros souvenir. Le plateau de fromages affinés par la mère Richard recèle certaines perles comme le Saint-Marcellin, le Saint-Nectaire, mais il est vrai qu’on pourrait s’attendre à ce qu’il soit un peu plus garni. Pour le dessert, le système de buffet fait s’animer une multitude de serveurs à tout moment et est l’acteur principal du balais de fin. Hélas il est difficile de juger car inhumain de tout goûter. Et finalement pourquoi juger, mais les choix pourront en frustrer certains. La crème brûlée, les fruits, glace vanille, tartelette aux fraises des bois valent le détour. Le reste demeure une motivation pour revenir.
Ce fut un grand moment avec de grands plaisirs. Plus qu’une envie, goûter le reste de la carte.

mercredi 9 mars 2011

Alain Ducasse au Plaza Athénée : un carnaval de saveurs.

Il y a des moments qui se veulent rares, se rapprochant de la perfection, allant jusqu’à effacer cette limite. La chance m’a été offerte par mes amis de me rapprocher des étoiles culinaires et même si j’avais pensé au départ attendre les trois dégustations proposées pour m’épancher sur ces restaurants gastronomiques triplement étoilés les sensations exceptionnelles que m’ont offert ces moments sont trop impatientes de se voir figées pour ne pas disparaître en un tout mirifique. Me voici donc dans le lobby du Plaza Athénée, célèbre palace parisien, situé dans un quartier semblant préservé de la pauvre réalité par des murs invisibles, mon oeil d'anthropologue novice n’en revenant pas devant les styles si volontairement originaux et parfois ridicules. Pardon l’on dit fashion, la semaine de la mode de Paris ayant sans doute contribué au remplissage de l’établissement hôtelier et ayant dû accentuer le phénomène.
Histoire de pipeauter quelques bémols, le restaurant 3 étoiles du célèbre Alain Ducasse est situé au coeur d’un hôtel ce qui donne moins d’authenticité aux premières impressions qui s’offrent au visiteur. L’endroit fameux en ravira d’autres, histoire de goût, enfin pas encore. Une fois dans la salle, un double sentiment envahit, celui du luxe devant cette haute salle, véritable joyau doré aux lustres de cristaux éclatés, et de raffinement avec cette présentation devenu depuis 2010 et le changement d’angle beaucoup plus minimaliste. Sur la table se dévoilent une assiette oeuvre d’art et verre à eau. Je ne vais pas passer toutes les étapes en revues histoire de préserver les surprises aux prochains aventureux mais l’impression générale de ravissement à chaque étape en devient persistante, dessinant un large sourire indélébile, pouvant passer pour un état d'ébriété alors qu’il s’agit d’un enivrement inscrit sur le visage du convive.
Le service est bien entendu impeccable et sympathique. Le serveur s’occupant de notre table prenant le temps de nous expliquer et les plats et la démarche esthétique et culinaire de l’ensemble allant jusqu’à nous offrir de jeter un oeil à la cuisine et l’arrière salle. L’ensemble est extrêmement bien huilé, les amuses-bouches, les entremets et les plats s’enchaînent jusqu’à la toute fin. Nous nous sommes laissés guidés sur le vin et je n’ai donc pu évaluer la profondeur de cave dont je ne doute cependant pas vu ce qu’il en est dit par ailleurs. Sur la carte on retrouve des plats qui frappent par leur apparente simplicité. Pas de termes galvaudés en ligne avec cette volonté de servir une cuisine brute, sans fioriture, consacrant le produit.
Quelques musts sont proposés dans la section héritage comme le pâté chaud de pintade truffé, sublime avec son jus qui vient relever cette magnifique composition. La différence de textures, la cuisson parfaite des différentes parties, le croustillant de la pâte, miam miam miam. La suite fut du même niveau, le homard pommes de mer en cookpot, tout simplement sublime. Deux plats extrêmement racés aux goûts puissants et charmeurs. Le plateau de fromage, malgré sa cloche impressionnante, pourrait être plus garni, autre léger bémol compensé par cette petite brioche à la mascarpone et à la truffe en accompagnement. Je passe sur les mignardises pour le final, le baba au rhum où l’on vient vous faire une dégustation de rhums de haute volée, certains tourbés, d’autres finis en fûts de pommards, pour la plupart aussi âgés que moi afin de choisir celui qui viendra sublimer, accompagné d’une crème vanillée, le baba.
Cette recherche du produit juste et excellent afin de la consacrer dans l’assiette sans le dissimuler par trop d’artifices est une réelle réussite. Un moment de bonheur, de pureté gustative qui tend vers la perfection.

lundi 21 février 2011

Des éclairs de génie

Des éclairs de Jean Echenoz est annoncé comme la clôture de la trilogie dans laquelle il se fait le récit de trois existences connues, remarquables et à la fin tragique. Trois génies et tragédies, Ravel, Zatopek et Tesla, qui n’ont à première vue pas grand chose en commun sauf leur fin, ont donc été l’objet des trois derniers livres d’Echenoz : Ravel, Courir, Des éclairs. De ceux-ci seul Courir m’a échappé, ainsi le rapprochement que je peux en faire ne concerne pas l'ensemble du triptyque mais son début et sa fin.

Gregor, héros de l’ouvrage est le double échenozien du célèbre mais souvent mal connu inventeur serbe Nikola Tesla que l’on suit au travers de ses découvertes rocambolesques. Cela fait de ce livre un roman instructif. Me rappelant vaguement de l’unité Tesla pour la mesure de champs électromagnétiques, je n’en connaissais pas grand chose d’autre. Qu’il s’agisse du développement du courant alternatif, de l’invention de la radio, du radar, même du laser, cet inventeur semble être dès les premières pages un inventeur de génie, étant celui qui fit basculer, travaillant alors chez Westinghouse, les Etats-Unis vers le courant alternatif plus pratique au dépends du courant continu d’Edison, trop contraignant et moins fiable. Ce dernier allant par rage démontrer les dangers de ce courant alternatif sur l’homme en créant ce qui s’avérera être la première chaise électrique. Il est fascinant de voir que l’un des outils des massacres légaux le plus utilisés n’ait été à la base qu’un contre argument marketing, ne voulant pas vanter le côté humain car peu douloureux de l’arme de la mise à mort comme le fit Guillotin, mais voulant prouver l’atrocité de l’effet du courant alternatif sur l’homme. Il est d’ailleurs révélateur pour l’histoire des Etats-Unis que cet outil de massacre et de torture ait été le moyen de mise à mort le plus répandu pendant un siècle, avant de céder place peu à peu à un procédé plus clinique, l’injection létale.
Concernant la trajectoire du héros, elle est, comme le sont souvent les sujets de ce type d'ouvrage, triste et tragique. Sans doute les héros épanouis finissant dans le bonheur ne laissent que peu de place à l’interprétation de l’auteur et sont donc moins choisis comme matière à romancer, à moins qu’ils ne soient tout simplement moins nombreux. Dès le départ, on sent que Gregor ne vit pas pour être heureux, il est animé par l’excitation de la découverte, agissant plus comme un Dom Juan de l’électricité, développant un concept, déposant un brevet à la va-vite puis passant à autre chose, sans doute pour atteindre un but quasi impossible, maîtriser l’énergie universelle et l’amener à la disposition de tout un chacun gratuitement, voulant réaliser une action digne d’un dieu. Projet vu du mauvais oeil de ses industriels contemporains, et qui le serait toujours aujourd’hui, condamnant les marchands d’énergie.
On espère à chaque page que Gregor va s’épanouir, s’ouvrir aux autres, montrer du bonheur, et rien, le tragique le poursuit et l’auteur qui le décrit avec un ton le plus souvent compatissant mais parfois condescendant, semble ne pas vouloir le sauver même pour le bien-être du lecteur. Confirmant que l’ennemi n’est ici pas la maladie, comme ce fut le cas de Ravel qui dut céder à une déchéance mentale et physique, mais est en lui même. Les scènes de fin sont d’ailleurs pour moi trop longues et trop marquées, alors que quelques pages auraient suffi à nous faire comprendre cette fin tragique. L’auteur reste respectueux de son sujet et ne devient étrangement familier que par deux moments qui ne sont pas dans le ton de l’ouvrage et sont les seules imperfections de cet ouvrage froid et mélancolique (moments de l’appétit sexuel et celui de l’exaspération face au pigeons).
Pour ceux qui ont lu Semmelweis de Céline, vous y trouverez des similitudes marquantes et des destins que l’on peut rapprocher de par le côté précurseur, révolutionnaire et mal aimé des défenseurs des dogmes. J’avais été emballé par Semmelweis, ici un peu moins sans doute à cause de la possible redondance du propos, cela reste néanmoins un ouvrage instructif et efficace.

mardi 25 janvier 2011

La carte et le territoire de Michel Houellebecq

Rares sont ceux, dans ma génération, qui avouent être des novices de Houellebecq tant il oscilla entre phénomène de mode, dernier génie de la langue française ou encore usurpateur dénué de talent. Même si je l’ai pendant longtemps mésestimé par simple anticonformisme me voici il y a quelques mois devant l’ouvrage sur un étale, réalisant ma stupidité d’avoir laissé un préjugé guider mes non-lectures.
Je fais mon mea culpa et entre donc en possession d’un exemplaire de la Carte et le territoire sans savoir du tout à quoi m’attendre ce qui fait sans doute de ma lecture, une lecture assez neuve sur l’ouvrage d’un auteur étudié, disséqué et vilipendé maintes fois. On m’a prévenu : “tu ne devrais pas commencer par celui là, il est pas mal mais c’est vraiment pas son meilleur”.
Prévenu je prends l’ouvrage avec des pincettes. Les premières scènes et le schéma narratif est simple, assez classique et m’embarque plus par curiosité que par réel goût du style. J’ai trouvé cela assez froid, pas loin d’être chirurgical par moment. Pas que ce soit tranchant mais plutôt aiguisé, on sent que l’auteur est sur le fil, ne voulant pas faire décoller l’ouvrage ni le faire sombrer dans des histoires totalement dénuées d’intérêt.
J’ai été surpris par ce qui m’est apparu être des règlements de compte avec différentes personnalités (“le coming-out de JP Pernault) et par les placements de marque. Ce qui m’a fait m’interroger sur le rapport à l’argent de l’écrivain même. Rapport qui est mentionné par la suite lorsque l’auteur se met en scène, se faisant apparaître comme un personnage clé du roman. Du coup on ne sait vraiment plus sur quel pied danser. Je prends plutôt le parti que l’auteur ne se prend pas au sérieux et souhaite presque s’excuser d’exister, de ce qu’il est, morfondu dans un inconfort moral anéantissant.
En adoptant ce point de vue le personnage de Houellebecq prend un caractère inévitablement comique, et ce jusqu’à la fin. C’est ce qui m’a fait tant aimer cette troisième partie qui recèle de moments d'anthologie. Sans en dire trop celui de la cérémonie est tout simplement splendide. De même que ce déplacement de l’intrigue sur un terrain qui semble n’avoir que peu de choses en commun avec les deux premières parties pour mieux revenir au destin et à l’analyse psychologique du héros.
Au départ, ce héros, Jed Martin, plutôt un antihéros assez typique de la littérature française contemporaine, est en grande partie paumé, dans un état de semi-latence sociale, n’ayant pas grand chose dans la vie sauf ses quelques créations artistiques dont le succès nous est distillé au compte-gouttes par l’auteur. Orphelin de mère et avec un père qu’il pense plus absent que lui même mais qui s’avère être en fait son double du monde professionnel, Jed passe à côté de ce qui semble être les bonheurs communs de l’existence. Il ne peut pas aimer, ses névroses le poussent dans son art et l’excluent tout à fait. De ce fait le héros Jed Martin est sans doute plus un autoportrait de l’auteur que le personnage de Houellebecq (dans le livre) lui-même, ou plutôt il est ce qu’est Houellebecq et le Houellebecq du livre est la projection que l’auteur a de lui-même. En somme on pourrait avoir peur de tourner autour d’une fausse histoire, simplement égocentrique plus qu’autobiographie mais les ressorts scénaristiques, les pointes d’humour, les critiques des us et coutumes et autres dérives de la société en font un roman savoureux, sans trop de longueurs.
J’entends à droite et à gauche que ce n’est pas son meilleur, que ça ne vaut pas un Goncourt. Pas son meilleur, je ne peux pas juger, pas un Goncourt pas d’accord vu la qualité générale de la littérature française contemporaine. Plongez dedans, vous ne serez normalement pas déçu. Et si vous l’êtes je crois que vous êtes en phase avec notre triste époque littéraire.

mardi 11 janvier 2011

Révoltes anonymes

Le mois de décembre a porté à ma connaissance un phénomène nouveau et fascinant.
Cela fait bon nombre d’années que l’on utilise et développe l’outil internet sans forcément avoir de réglementations comme celles de la vie physique et bon nombre de cas tombent dans un vide juridique. Comme les questions sur la sécurité, la confidentialité et même l’exactitude et le contrôle des informations.

Je me souviens il y a encore peu avoir pris peur en lisant sur Wikipedia que les requins étaient des mammifères. Je ne vais pas faire ici le procès d’Internet, c’est devenu impossible tellement cette quantité d’information et la rapidité de son évolution rendent caduque toute analyse. En revanche Wikileaks a changé la donne. L’information semble dans ce cas avoir surpassé tout contrôle, ou presque. C’est le premier énorme scoop 100% web. Devant ces fuites plus ou moins graves, les informations étant déjà connues des principaux intéressés, ce sont sans doutes les inspecteurs des RG et autres agences qui en ont été les plus incommodés, voyant d’un coup leur utilité mise à défaut par le géni (positif ou négatif en fonction des points de vue) de hackers. Est-il bien ou mal que Wikileaks rende de l’information hautement confidentielle publique, je vous renverrai aux deux articles du fondateur de Mediapart, dont je partage le point de vue (voir liens dans l’article précédent). En revanche cette révolte anonyme d’une communauté, ou bien d’un groupement qu’il est bien difficile à appréhender, étant pire que Protée, et auquel n’importe quel possesseur d’ordinateur peut potentiellement prendre part, est remarquable. Dénommée étonnement par le terme Anonymous, ce collectif parsemé est l’auteur d’attaques en représailles qui ont touché les sites qui sont devenus Wikileaks non-friendly comme Amazon et Paypal qui, ayant sans doute cédé à la pression politique, ont cessé de fournir leurs prestations contractuelles (paiement, hébergement) au site visé sans pour autant qu’un jugement n’ait prononcé la culpabilité de ce dernier. Le seul chef d’accusation reposant sur du “sexe par surprise” attribué au fondateur, aujourd’hui libre sous surveillance, l’affaire n’étant pas encore jugée.

Le collectif Anonymous se tourne aujourd’hui vers la Tunisie, en proie à une lutte inégale envers son pouvoir autocratique, népotiste et liberticide (voir article) Le contrôle d’internet y devenant total pour limiter la fuite d’informations et empêcher que l’opinion publique internationale ne puisse s’en mêler. Les attaques des hackers vengeurs se sont concentrées vers les organismes de censure internet tunisiens.

Comment cela marche : Je ne suis pas technique et vais donc exposer ce que j’en ai compris simplement. Des hackers peuvent utiliser une multitude d’ordinateurs qui vont envoyer des requêtes qui ne pourront aboutir au site visé, le site devant la multitude de requête ne peut plus répondre et plante. Ce phénomène de réseau est aujourd’hui même volontaire et tout le monde peut participer de son plein gré à cette chaîne en téléchargeant simplement un logiciel (LOIC) qui permet de coordonner en réseau les attaques, qui seront donc émises d’une multitude d’ordinateurs. Même un grand-père ayant du mal à comprendre pourquoi il y a deux touches à sa souris pourrait prendre part à ce type d’attaques.

C’est le deuxième fait d’armes similaire avoué et reconnaissable et il faut sans doute compter avec pour les prochains mois. Je n’ose hélas pas dire les prochaines années redoutant un contrôle et une censure du net généralisée. Le pouvoir affichant sans vergogne son déni de la liberté démocratique, ayant peur des fuites et de la publication d’informations le concernant.

Ces évènements (l’action d’Anonymous) peuvent marquer un tournant, consacrant les premières révoltes Internet. Non pas dans le fait qu’il y ait des attaques de hackers, cela a toujours été et restera constitutif du développement informatique et d’Internet, comme les virus le sont du développement de l’humanité. Mais dans le fait que des personnes de toutes parts, de touts pays, réagissent à ce qu’ils pensent ne pas être juste, ne pas correspondre à leurs valeurs, voulant défendre la liberté d’expression, la démocratie et luttant contre la répression dictatoriale. De ce fait 2011 est porteur d’espoir. Des mouvements comme Anonymous ou the Legions of Underground qui combat la censure du net en Chine ne peuvent que se développer.

Il s’agit d’une création de communauté transnationale, comme un réseau de résistance partageant un but commun : la liberté d’information et d’expression. Je trouve cela fascinant d’un point de vue sociologique de voir une conscience collective s’opposer, au-delà des frontières et des bulletins de vote à ces tyrannies de censeurs et à cette tendance qu’ont nos politiques de tout contrôler, ayant perdu confiance en leur propre capacité à gouverner à un peuple libre et critique.

Néanmoins des problèmes intrinsèques surgissent et pourraient sonner le glas de ces actes citoyens. Premièrement il s’agit d’actes hors-la loi, et même si Zorro a prouvé qu’on pouvait durer longtemps, il n’est pas certain que cela se passe sans heurts. Deuxièmement il pèse une incertitude sur les fins et les directions de ces mouvements. Imaginez un instant que ces réseaux de hackers puissent servir des intérêts contraires à ceux initialement poursuivis. Enfin ces tendances vont renforcer les mesures de contrôle sur internet et j’ai peur que d’une volonté de civiliser internet, l’on passe à un Big Browser y pourchassant toute liberté. Les déclarations récentes d’homme politiques comme François Mitterrand font froid dans le dos (concernant l’interdiction d’hébergement de Wikileaks en France).

Cette année s’annonce critique pour la liberté d’expression et la défense des valeurs fondatrices de la démocratie. En vue de toute prochaine élection il est important que les hommes politiques intègrent cela dans leurs programmes, afin que cette régulation d’internet demeure républicaine et que l’on puisse s’exprimer sur ce sujet primordial.

mardi 4 janvier 2011

Saupoudrez 2011 d’une once d’indignation !

Bonne année.
Nous voilà repartis avec la fausse impression que les compteurs ont été remis à zéro. Pas de bilan pou 2010 me concernant, j’ai été trop absent et n’ai traité que quelques sujets, essentiellement des oeuvres, étant contrit par les évènements et partiellement convaincu que dénoncer des tendances ou des politiques penchant vers ceux des régimes qui ont fait les plus grands drames du 20ème siècle ne sert pas à grand chose.

Et c’est tout à l’heure que je me pris une piqûre de rappel par un monsieur de 93 ans à l’histoire héroïque, résistant aux côtés de de Gaulle et ayant participé à la rédaction de la déclaration universelle des droits de l’homme. Stéphane Hessel a publié il y a de ça quelques fois un tout petit essai par la taille, imprimé en une version simpliste sans reliure et qui porte en titre principal le message qu’il souhaite faire passer “Indignez-vous”.

Je l’avais acheté par curiosité, comprenant qu’à l’époque les 100 000 exemplaires vendus de cet ouvrage à pas plus de 3 euros pouvaient receler quelque chose de pertinent. Je ne connaissais le nom de l’auteur que de loin, mais je me suis dit un petit vieux qui souhaite faire bouger les choses, ça peut le faire. Tout à l’heure je retrouve en ligne que les ventes ont atteint les 800 000 et me décide avant d’être devancé par le million à lire cette quinzaine de pages. A vrai dire, tant de ramdam avait aiguisé mon appétit et, mon attention et mes attentes tranchantes ont été déçues. Pas que l’ouvrage soit inintéressant, mais je pensais à la lecture des articles qui y étaient consacrés qu’il s’agissait d’une bombe. Peut-être que mon intérêt passé pour la littérature d’engagements m’avait déjà éveillé aux thèses reprises dans l’essai et qu’il ne s’agissait pas d’une découverte, mais plus d’un rappel.
Et réflexion faite d’un rappel très utile. Je ne vais pas me lancer dans un résumé simpliste du propos, mais comme on le comprend vite cet ouvrage a pour but de réveiller nos consciences de consommateurs et citoyens asservis pas une pseudo image de bonheur en d’autres termes : Arrêter d’être mou, apathique, d’avaler l’avoine du pauvre d’esprit, il faut réagir !
Réagir devant l’accroissement de l’écart de richesses, réagir devant l’aliénation croissante des libertés, réagir devant nos modèles d’éducation qui tendent à consacrer la compétition individualiste aux dépends de l’intérêt général …

100% d’accord avec ce court essai, le refermant ayant bonne conscience, je commençai par m’étonner et voire m’attrister que cet ouvrage ait tant de succès. Faisant preuve de condescendance je dépeignais déjà mentalement avec dédain cette foule de parisiens sautillant chez leur libraires, rongés par l’impatience de pouvoir briller en société en citant l’ouvrage salutaire à la mode, et découvrant par hasard la notion de responsabilité sartrienne, en parler 30 minutes lors d’un dîner où on vanterait les bénéfices du bio et du Bon marché gourmet, puis partant repus de bonne conscience au ski, redevenant d’hostiles animaux égoïstes au volant de leur 4X4 pris au piège des bouchons du tunnel de Fourvière, ne souhaitant qu’écraser cette vulgaire C3 populaire qui n’ose pas s’engager.

Et d’un coup je fus reprise par la patrouille, pas une des nombreuses qui sont déployées en France depuis la politique de couvreHortefeu mais bien une morale, personnelle et intransigeante. Que fais-je moi à part approuver et ruminer ? Pas grand-chose, d’où cet élan d’écriture, qui n’est presque rien mais qui je l’espère peut contribuer à suggérer l’engagement par la lecture de ces feuillets.

En plus de cela quelques articles intéressants, un premier sur un ouvrage non distribué en librairie parlant des dérives actuelles en France que mentionne Pierre Assouline et deux articles intéressants d’Edwy Plenel, fondateur de mediapart 1 et 2.

Sur ce bonne année, bonnes lectures en espérant qu’elles ne se résument pas qu’aux best-sellers imposés par le mass-media et en espérant qu’Internet ne devienne pas civilisé (voir 1er article de Plenel).