vendredi 19 mai 2017

Disparitions musicales

J’aurais déjà pu en écrire en tout 5 cette année, des hommages à des personnes disparues qui ont compté pour moi. Même si l’âge de certains peut expliquer leur départ, pour d’autres ce n’est pas le cas. Cette semaine ce sont deux figures qui ont engendré ma passion musicale qui se sont éteints, l’un inconnu du grand public s’éteignant à un âge où on ne crie plus au scandale, l’autre star planétaire bien passant l’arme à gauche bien trop tôt. Je ne suis pas un musicien, ça aura été sans doute un de mes plus grands regrets, c’est comme ça je me suis fait une raison depuis lors mais mélomane certainement.

Le premier, homme de ma famille qui connut une enfance sous l’occupation allemande puis qui put se confronter à l’horreur humaine lors de la guerre d’Algérie était un ancien cheminot, touche à tout, fan d’histoire, d’ornithologie et de musique. Ses oreilles étaient altérées par un travail assourdissant sur les rails mais ça ne l’empêchait pas d’être un amateur de jazz et de me faire découvrir au casque, lorsque les grands dînaient, des morceaux de Duke Ellington et de Dizzie Gillepsie. Il jouait aussi avec brio de l’harmonica, diatonique ou chromatique. Je voulus suivre ses traces mais mon harmonica Hohner flambant neuf ne donnait que peu de mélodies cohérentes sous mon souffle. Ces bases de ma petite enfance ainsi que les écoutes de vinyles des premiers acteurs du rock n’ roll ont tracé ma route d’amateur de musique. Assez vite je fis partie des ados et jeunes qui passaient du temps à écouter de la musique, pas en fond mais  bien comme activité principale. Quand on me demandait, tu as fait quoi ce mercredi après-midi il n’était pas rare que je réponde : “ J’ai écouté de la musique. - Non mais t’as fait quoi ? - Bah j’ai écouté de la musique. - Rien d’autre ? “ Et là c’est moi qui ne comprenait pas la question. Comme si l’écoute d’un album ne nécessitait qu’une demi-attention. Je suis donc devenu un passionné de musique de styles très variés il faut dire, en allant jusqu’à certains extrêmes (brutal death grind core metal et j’en passe). Parmi tous ces groupes celui que j’ai écouté le plus, de mes 14 ans jusqu’à aujourd’hui avec une fréquence toujours élevée, n’éprouvant aucune lassitude à l’écoute de leurs albums est Soundgarden. J’ai appris hier que le co-fondateur et chanteur Chris Cornell est mort soudainement la veille à Détroit, en plein milieu d’une tournée du groupe. En plus d’adorer les albums de Soundgarden (Dow on The Upside, Superunknown, Badmotorfinger, Louder than love) j’ai aussi développé une admiration pour Chris Cornell et l’ai suivi dans ses différents projets.

Je pense que son premier album solo a été celui que j’ai le plus écouté l’année de sa sortie, ainsi que
celui de Temple of the dog où son enchevêtrement de voix avec Eddie Vedder était sublime. Et dans un deuxième temps Audioslave, essentiellement les deux premiers albums. Sa voix est, était, exceptionnelle, capable d’alterner douceur, déchaînement rock et aigus splendides naviguant entre les octaves (4 à ce que les spécialistes en disent). Un son reconnaissable entre tous et un talent énorme. Il y a peu d’artistes qui arrivent à avoir du succès autant dans leurs projets parallèles que dans leur groupe phare. Ses albums solos sont très bons, même si il a expérimenté certaines choses qui peuvent en rebuter certains. Audioslave assurait et Soundgarden je le mets au Panthéon du rock. Même leur retour avec King Animal n’était pas loupé. Ce n’était certes pas leur meilleur album, mais il donnait l’espoir qu’ils y étaient encore et que le futur était prometteur, que les clivages passés entre Chris et Kim étaient histoires ancienne, entre une ligne de rock plus agressive et celle de morceaux plus posés. Soundgarden n’a certes pas tenu son succès que de Chris Cornell, les 4 membres sont excellents et forment un tout homogène et admirable. Kim Thayil avec ses lignes de guitare pleines de feeling, capable d’aller chercher au bon moment des harmonies exotiques. Ben Sheperd avec ses lignes de basse qui vouent tuméfient l’estomac en concert et Matt Cameron qui fut plus longuement connu comme batteur de Pearl Jam après la split de 1997, capable de tenir des concerts de plus de 3 heures avec brio. Je les avais vu une fois, lors d’un festival en 2012, c’était top même si pas assez long et le public présent n’était pas qu’un public de fans, attendant surtout Metallica qui jouait à la suite. C’était dans mes carnets d’aller les voir à la prochaine tournée, surveillant les dates de leur tournée d’été aux Etats-Unis espérant qu’ils passent l’Atlantique prochainement, me posant même la question de savoir si un petit A/R n’aurait pas été possible. Et voilà bam, tout s’arrête d’un coup. Plus d’harmonica, plus de chant, il reste pour le deuxième les disques certes, mais ça va faire un sacré manque.

mardi 9 mai 2017

La nausée

Et pourtant je ne suis pas enceint ni particulièrement amateur de Jean-Paul Sartre. J’ai eu ma période bien entendu (par rapport à Sartre et sans aucun autre jeu de mots) mais m’en suis assez vite détaché, sans que ce ne soit la lecture longue et ardue de l’Etre et le Néant qui m’en éloigna ni la lecture du livre de BHL consacré au plus célèbre binoclard de la littérature française que j’avais trouvé assez passionnant l’ayant vu en conférence sur le même sujet.

Il attaque fort cet article, Sartre et BHL dans le même paragraphe, ça pourrait en effet causer une irrépressible envie de vomir à certains mais pas à moi. Ce sentiment que j’éprouve depuis plusieurs semaines vient donc d’ailleurs, et plus particulièrement de l’action que je dus commettre ce dimanche 7 mai, c’est-à-dire aller voter avec un profond haut-le-cœur mais en ayant le sentiment de ne pouvoir faire autrement. Un peu comme quand vous avez beaucoup trop bu et que le vomi est salutaire même si vous savez bien que sur le coup il peut être douloureux, irritant l’œsophage et pouvant même remonter dans le nez, sans parler des dégâts externes comme les salissures et l’odeur.
 
Je ne soutiens en rien Emmanuel Macron jusqu’aujourd’hui. J’espère sincèrement me tromper et le voir se tourner vers des préoccupations essentielles. Faire des cadeaux sur les taxes aux entreprises sans création d’emploi (ce derrière quoi il est) ne fait pas partie de mes credo. Pour résumer, augmenter les revenus des plus riches sans répartition, sans se soucier de la durabilité de l’exploitation des ressources ni du bien être des masses, je ne suis pas fan. C’est bizarre me direz-vous, sans doute suis-je resté un enfant appliqué qui espère qu’une certaine justice existe et ne trouve pas normal que l’un ait 1000 fois plus que l’autre, tout CEO qu’il puisse être. Il a mené jusqu’à présent une politique bien plus libéral et bien plus éloignée du socle des principes de cohésion sociale que tous les libéraux de droite auparavant. Qu’il ait réussi à être élu à sa première tentative d’élection politique, et de plus Président de la République est remarquable. Enfin quand vous avez un consensus des intérêts des détenteurs de capitaux et donc des propriétaires de groupe de presse ça peut aider. Alors est-ce que je remets en cause l’indépendance journalistique et la déontologie du métier, bien entendu. Non pas au niveau de l’individu journaliste mais bel et bien de la gouvernance des groupes de presse. Si vous mettez les esprits les plus critiques à la chronique des vieilles chattes mouillées écrasées (encore une fois aucun lien voulu avec Macron dans cette illustration) et que vous gardez un certain type de journalistes à la couverture politique vous aurez facilement une orientation qui va se dessiner. Et puis en termes de communication, nos esprits qui sont affadis par les scandales passés et abrutis par tout ce que déverse le mass media de plus débilitant  étaient prêt à gober ce prétendu changement. Le changement c’est maintenant … Ah non je me trompe, encore. C’était en marche, on ne savait pas trop vers où, en tout cas tant que ça pouvait ramener du monde et des électeurs on y allait.  Cela pouvait donner l’impression de passer devant les vitrines du quartier rouge d’Amsterdam, un peu de tout et pour tous les goûts, tant que ça peut vendre.
 
Nous voilà donc avec un nouveau président, vernis marketing d’un libéralisme d’affaire bien rodé, l’illusion du neuf, le Canada Dry du renouveau politique. Que les gens y croient, et bien tant mieux si ça peut porter un peu d’espoir et encourager ces militants à influencer la politique du plus jeune président de France. 
J’ai peur que la désillusion ne soit encore plus dure à encaisser cependant. D’autant que nous serions informés si Macron souhaitait vraiment le changement, il aurait notamment parlé de comptabiliser les votes blancs en les rendant éliminatoires. Chaque candidat ayant moins que le vote blanc se verrait éliminé de l’élection et s’il se voyait éliminé trois fois par le vote blanc, il ne pourrait se représenter à toute autre élection du même niveau (nationale ou locale ou européenne). L’abstention serait moindre et il est vrai que nous aurions sans doute vu et Macron et Le Pen se faire éliminer au second tour. Voilà ma deuxième idée de proposition après celle de la séparation du milieu des affaires et de l’actionnariat des groupes media, cette fois-ci la reconnaissance d’un vote blanc puissant, afin de donner l’impression aux électeurs qu’ils peuvent avoir le choix sans qu’ils soient pris en otage et obligés de voter pour la peste ou le choléra. Et sans nausée.