vendredi 25 septembre 2009

I got the blues

Petit hommage à l’initiative de Martin Scorcèse d'il y a déjà plus de cinq ans et qui avait comme objet de rendre hommage à sa musique préférée, le blues.
Grâce à lui et au déstockage des coffrets reprenant les 7 DVDs ainsi qu'au coffret musical des 5 Cds qui reprend l’essentiel des chansons citées lors des films je suis devenu fan. On ne devient pas fan de cette musique a priori relativement simple en une fois.

C’est très étrange, il semble que cette musique doive d'abord passer au travers de nos différentes carapaces qui en général sont plus réceptives aux musiques simplistes grâce auxquelles nous ne pouvons au mieux que ressentir un vague désir sexuel si le tout est arrosé de plusieurs vodka-redbulls.

Je n’ai pas encore eu l’occasion de visualiser l’ensemble des films documentaires, chacun réalisé par un metteur en scène différent et portant sur un thème particulier, mais après en avoir vu la moitié et surtout écouté en boucle les différents disques, de Skip James à Taj Mahal, j’ai été pris au tripes. Pris par ces rythmes qu’on ne peut s’empêcher de dissocier des rites tribaux africains. Cette pulsion du cœur et de l’âme qui s’exprime par la musique, cette profondeur abyssale qui permet de s’élever. Tout ceux qui ont écrit à son propos, ont toujours fait l’éloge de la musique sans toujours d’ailleurs se justifier. Car quel besoin, il suffit, d’écouter un clapotis ou du vent dans les arbres pour se sentir apaisé et comprendre le côté essentiel qu’a la musique, naturelle ou composée, dans nos vies. Je ne peux développer comme ceux qui ont prouvé qu’il était plus facile d’apprendre en écoutant du Mozart, mais cette énergie qui va au cœur en ce qui concerne le blues est venue essentiellement des champs de coton, et plus particulièrement du delta du Mississipi.

Véritable exutoire à la dure vie d’esclave/travailleur manuel, les blues-men avaient une capacité à parler net et directement à l’âme de leurs auditeurs. Je répète énormément ce mot âme, mais prenez cette chanson d’Othar Turner, Shortnin’, où les percussions s’entremêlent surplombée par un air de fifre qu’on aurait vite fait de juger comme jouant faux s’il n’était utilisé avec une telle puissance. « C’est l’homme qui fait parler l’instrument, si tu ne mets rien dedans rien de bon ne sort » et c’est ce qui fait la force du blues, l’impression que celui qui joue s’ouvre les tripes et nous les sort telles quelles devant nous, sans crier gare, encore chaudes de ses expériences. Ce serait trop réducteur de ne parler que de l’émotion générée par ces personnages pour la plupart issus de la classe la plus prolétaire qui soit. La maîtrise de leur instrument est énorme, d’autant plus que comme ils le font remarquer, ils arrivaient à sortir des sons d’instruments moins systématiques et parfaits qu'aujourd’hui. C’est peut-être aussi en partie ce qui fait le charme de cette musique, d’avoir un corde qui frotte, une caisse qui résonne trop et une voie qui déraille sous l’émotion.
Le parcours qu’offre Scorcèse a le mérite, comme il le dit lui-même d’un de ces prédécesseurs qui avaient parcouru le monde entier afin d’enregistrer la musique partout dans le monde, d’ancrer dans les mémoires des morceaux d’émotions, reflets eux-mêmes de morceaux d’histoire avant qu’ils ne s’éteignent avec leurs derniers interprètes.

Plongez vous dans Blind Willie Jonhson, Son House, Charley Patton, Robert Johnson et tous les autres sans hésiter, ne vous fiez pas à votre première impression, laissez les disques tourner et vous verrez des vies entières défiler avec leur lot de sentiments universels.