mardi 30 juin 2009

C'est lait

Alors que Mickael Jackson est mort il en est certains qui continuent de se battre pour des centimes pas litres. On est loin du battage médiatique déchaîné par la triste et tragique mort du roi de la pop, et pourtant ils aimeraient bien. Il y a une dizaine de jours venaient sous mes fenêtres quelques 800 tracteurs afin d’émettre des meuglements protestataires lors d’un sommet européen rendant ainsi l’usage du nouveau velib fortement recommandé (ils sont forts chez Decaux).
Que se passe-t-il ? Le prix du lait totalement dérégulé mets nos éleveurs sur la paille, ok celle là elle est assez facile mais c’est hélas vrai. Le cours du lait s’effondre alors qu’en magasin le consommateur n’en voit pas la couleur, c’est assez laid. Dire que c’est étonnant, non, les cultivateurs s’insurgeaient déjà vivement ces dernières années, mais quand le cours d’achat est bien inférieur à celui de la production, évidemment on comprend le problème. Dans ce cas on se dit que l’offre est supérieure à la demande et c’est là qu’on se souvient de nos cours de lycée qui nous parlaient de politique agricole commune, avec des quotas, des sols en jachère, le tout pour maintenir un prix minimum, l’autre pour ne pas céder à la course aux rendements.
Alors quand Mariann Fischer Boels, lors de la manifestation, nie en partie le problème en refusant de céder aux pressions des agriculteurs qui souhaitaient qu’on diminue les quotas de production de 5% afin de revenir à des prix plus acceptables et que le problème vient seulement de la consommation, les poils de bœufs se hérissent. Si la consommation était plus basse on aurait dû observer une certaine baisse des prix des produits laitiers en grand surface ou du moins de réelles actions promotionnelles à grande échelle. Pourtant c’est loin d’être le cas. Les aides des états et de la commission européenne doivent-elles prendre le pas pour soulager ces agriculteurs, sans doute et certaines choses semblent déjà fonctionner (http://blogs.ec.europa.eu/fischer-boel/milk-crisis-no-time-for-stalling/) , mais n’est ce pas une nouvelle fois subir les plâtres d’un fonctionnement déséquilibré et subventionner en fin de compte des dividendes à l’autre bout de la chaîne.
J’aimerais que ces financements et ces aides publiques qui sont aujourd’hui nécessaires soient versées par les acheteurs de lait industriels, mais ils préfèrent mettre sous pression et étrangler les producteurs, se disant bien que l’argent publique règlera ça, et que mieux vaut augmenter les marges afin de pouvoir abreuver ces grosse vaches de grands actionnaires ou de fonds d’investissements. Pour tenter de faire bouger les choses, ces agriculteurs jouent le tout pour le tout afin de sensibiliser l’opinion publique et après avoir bloqué mon quartier pendant deux jours continuent à faire ce qu’ils peuvent comme bloquer le parlement à Luxembourg, bloquer des centrales d’approvisionnement. Certains avaient fait plus de 700 kms en tracteur pour venir d’Allemagne, pas très écolo tout ça, mais volontaire et obstiné.
Quand je me suis baladé pour faire un reportage photo, j’avais l’impression de voir des gamins, même pour les plus vieux, désorganisés, ne sachant pas où aller, pris et dépassés par l’évènement, pas violents pour un sou, faisant juste claquer quelques pétards pour les plus festifs, venus avec leur tente, leur barbecue, on se serait presque cru un moment sur les pelouses des campings des grands festivals d’été.
Et pourtant à part les media belges, les choses n’ont été que très peu relayées, notamment pas du tout en Allemagne d’où provenaient une grosse majorité des manifestants. Je ne sais quelle est la considération des media pour le monde agricole chez ce voisin mais j’espère qu’ils ne restent pas centrés sur les dernières sessions d’enregistrement de Tokyo Hotel. Car se couper de nos producteurs aux dures labeurs, ceux qui jouent le premier rôle de notre chaîne alimentaire et dont dépend la santé publique serait mortel. On a eu trop tendance à les dénigrer, alors qu’on remarque depuis deux décennies les affres d’une alimentation trop industrialisée.
Pour cela je voulais faire ce petit clin d’œil à ces producteurs de lait en espérant que le commerce équitable qu’on prône avec orgueil soit aussi d’application dans nos pays. Buvez du lait, et encore mieux allez le chercher à la ferme ;-).