jeudi 30 août 2007

Anyone can cook !

Ayant réalisé une expérience gustative inédite je tiens à rendre hommage aux défenseurs de la bonne cuisine et du bon goût.
J’ai, il y a peu, dîné dans un restaurant gastronomique prestigieux, le Comme chez soi à Bruxelles. C’était pour moi une découverte totale.
J’aime fréquenter les bonnes tables mais je n’avais jamais eu l’occasion d’aller dans les plus prestigieuses. Evidemment le seul bémol, la note, qui est, à l’inverse des plats, trop salée. Néanmoins on sait à quoi s’attendre et une abstinence de sorties de quelques semaines permet de compenser cela.
Certains goûts m’ont totalement subjugué, un turbot iodé sublime à en pleurer, un pigeon cuit à merveille …
Cette expérience a redynamisé mon sens culinaire créatif et je me suis remis, à mon niveau bien entendu, à tenter des petites nouveautés. C’est lorsque que l’on se heurte à des problèmes de compatibilité gustative qu’on entrevoit tout le travail qu’un chef doit réaliser pour arriver à créer de nouvelles recettes originales et harmonieuses.
C’est un véritable art, de la poésie à bouches. Un mot ne sonne pas avec l’autre, le rime n’est pas parfaite, il en est de même des plats. Un long apprentissage est nécessaire pour être capable de reconnaître les saveurs et les complémentarités. Comment faire du bleu avec des couleurs primaires ? Nous y sommes, c’est la puissance de la création de la composition, à partir d’éléments premiers et naturels. Quels pigments ? Quels aliments ? Il y a tant de plaisir à assembler toutes ces dynamiques, à les opposer, à marquer des contrastes comme Rembrandt aimait le faire dans ses toiles, alternant ombre et lumière. Dans l’assiette on y pense moins, mais la merveille naît d’un même processus artistique, une longue recherche, une profonde observation, de nombreux croquis et répétitions, des tentatives, des ajustements … Le plus sensationnel c’est que tout le monde cuisine et peut s’aventurer, à son niveau, sur cette voie de la création.
Trop de personnes qui se sentent exclues des milieux intellos et culturels, sont en fait de vrais chefs artistes, avec une capacité intellectuelle qu’ils ne soupçonnent pas.
L’art en général pâtit d’un snobisme destructeur. Combien de fois ai-je entendu des personnes se croyant cultivées dénigrer des tentatives de vulgarisation d’œuvres d’art ! C’est un scandale. Amener un plus grand nombre à s’ouvrir et à trouver un bien-être dans la fréquentation de musée, de salles de concerts est un but bien louable. Snober les personnes non instruites, comme je l’ai vu souvent faire dans des cercles parisiens est tout simplement insupportable à mes yeux.
Pour en revenir à la cuisine je pense que c’est le domaine à la fois quotidien et artistique devant lequel nous sommes tous égaux. Au même registre que la musique enseignée encore aujourd’hui jusqu’en troisième, j’aimerais avoir la naïveté de croire que l’on pourrait faire de même avec la cuisine et l’inclure dans le programme scolaire.
Nous voyons de plus en plus des campagnes télé prônant le mieux manger alors que les enseignes de fast-food et autre rois du kebab ne sont jamais portés aussi bien. Réagir au niveau de l’éducation permettrait aux enfants d’explorer les richesses de nos cultures, d’aiguiser les goûts, de comprendre les enjeux d’une alimentation équilibrée … Aujourd’hui beaucoup de parents se voient priver du plaisir d’éduquer leurs enfants d’un point de vue culinaire et c’est un réel problème.
« Tout le monde peut cuisiner », je fais référence ici à Ratatouille (voir post précédent), référence pas très évoluée diront certains mais qui permettra peut-être à de jeunes spectateurs de savoir quand et comment faire une sauce gribiche. Ce message paraît certes naïf mais est universel. Tout le monde peut le faire et tout le monde peut aiguiser sa curiosité, sa créativité et structurer son analyse grâce à cela. Cuisinons !
Un petit conseil de lectures pour les novices comme moi, le SOS Cuisine de Jean-Pierre Coffe, simple, accessible et très précis. Pour les autres recettes simples, Marabout entretient depuis quelques années une collection de petits livres très variés (amuse-bouches, chocolat, verrines …) à des prix très démocratiques.
Aller plus d’excuse et tous à vos fourneaux !

mardi 28 août 2007

Beyond the Core

Un conseil de lecture pour les personnes intéressées par la stratégie d’entreprise : Beyond the Core de Chris Zook, qui bénéficie du support de la très réputée société de conseil en stratégie Bain & Co est un ouvrage très instructif sur les mouvements stratégiques autour du core business.
Grâce à des analyses statistiques et qualitatives des principes essentiels sont mis en avant par l’auteur. Rien ne peut garantir le succès mais on peut tout faire pour. Pour reprendre mon exemple du poker (voir l’article « Poker face »), personne n’est à l’abri d’un mauvais coup mais le respect de certains principes permet de se mettre dans les meilleures positions pour que les options stratégiques soient fructueuses.

Les parcours d’entreprises ainsi que des comparaisons de sociétés concurrentes ayant des destinées opposées (Nike et Reebok) permettent au lecteur d’appréhender cette notion de mouvement autour du core business sans devoir être un expert en la matière.
Plus on s’éloigne du corps business, plus les choses sont risquées lorsque le management est persuadé qu’il y a un lien très fort et que le mouvement est minime.

Cet ouvrage ne traite pas de toutes les options stratégiques (les diversifications ne sont pas traitées) mais réellement de l’importance du core business, comment le préserver, comment le faire évoluer, comment gérer la pérennité de l’entreprise lorsque le marché du core business est en déclin… Les interviews de CEO des sociétés relèvent le tout avec des propos pertinents et sincères, tant sur les mouvements victorieux que sur les échecs.

Un bon ouvrage, précis et concis.

Auteurs modernes

Je vais passer pour un passéiste et souffrant du syndrome du « C’était mieux avant ! » mais si je me base sur mes dernières expériences, j’ai énormément de mal à être séduit pas nos auteurs contemporains.
Ecoutant plusieurs émissions radio leur étant consacré, j’ai appris à en connaître certains malgré moi. Je me suis alors fait la réflexion qu’ils écrivaient souvent sur eux-mêmes, ce qui est, pour ne pas le vexer, assez inintéressant. S’agit-il d’un problème de créativité ?
Certains de mes auteurs classiques préférés eux-aussi décrivent leur existence.
Alors où est ce problème qui fait que j’ai dû pour la première fois abandonner un livre, l’Amant en culottes courtes d’Adam Fleischer, j’ai failli faire de même si les émeutes de Laurent Mauvignier (Dans la foule) ne m’avaient pas rattrapées.
Que se passe-t-il chez nos auteurs ? Chez nos lecteurs ?
Je ne peux m’empêcher d’être choqué lorsque je vois que des auteurs comme Amélie Nothomb (histoire de balancer tout de même un peu) vendent beaucoup, ne parlons pas de Christine Angot, ce serait du pur sadisme. Bref, je me pose plutôt la question de savoir qui est cet écrivain d’aujourd’hui que je n’arrive pas à suivre.
Aujourd’hui on parle de soi, très bien. Avant aussi, surement un peu moins mais que faisaient Marcel Proust et Céline si ce n’est mettre leur vie sur papier ? Aujourd’hui on aime parler de soi. Il est vrai que lors des émissions radiophoniques la facilité avec laquelle bon nombre d’auteurs se font héros m’a surpris. Il suffit de regarder les couvertures des livres de deux dernières, leur photo en grand !
Pour être honnête, je pourrais parler de moi, mettre me photo et celle de mon chien ainsi que de ma théière préférée, mais en deviendrais-je réellement un héros ? Est-ce que le fait d’avoir eu des amourettes et de m’être cassé les dents quelques fois mérite un roman. Cela fait du bien de coucher ses émotions sur le papier mais les journaux intimes sont là !
L’écriture serait-elle devenue trop personnelle ? Pour la plupart des auteurs c’est ce que je pense. Si on écrit pour soi, et qu’on pense qu’afficher ses coucheries est la pierre angulaire de son œuvre, on ne peut pas se prétendre artiste. Un écrivain est un artiste.
Lorsque Proust nous raconte son parcours il touche au sublime de par le fait qu’il est dans l’essence même des sentiments, il en ressort une universalité imparable et touchante qui se moque des siècles, des origines et de l’éducation. C’est bien plus que de se faire le héros d’une histoire. Investiguer avec finesse et sans limites les désordres du cœur, les malaises des individus est l’objectif, et cela contribue à enrichir les lecteurs. Un artiste ne doit-il pas se mettre en danger pour les autres, aller au bout de l’éreintement psychologique et moral pour toucher des mondes dans lesquels très peu osent s’aventurer. Ecrivains modernes, posez vous la question de pourquoi vous écrivez et arrêtez de vous croire les plus importants dès que la moindre banalité pointe le bout de son nez. C’est tout simplement insupportable ! Jouez au tennis avec des adolescentes sexy tant qu’il vous plaira mais n’en faites pas d’ouvrage, s’il vous plaît. En revanche si vous êtes capables de nous décrire l’essence même du désir dans son universalité allez y, mais ne vous trompez plus !

Je suis certain que les 700 ouvrages de la rentrée littéraires recèlent des merveilles, j’espère juste tomber dessus. Alors si vous en découvrez, svp, faites en part.

jeudi 9 août 2007

Gangsters

Je fais partie de ces personnes qui sont capables de citer, à n’en plus finir, des titres de films de mafia. Elevé au western comme beaucoup, il n’y a qu’un pas pour se convertir aux westerns modernes, à ces films de gangsters où les méchants sont de vrais méchants et où les gentils sont tout aussi mauvais. Les Parrain sont bien entendu mes films de chevet, tout come les Affranchis ou les Kitano période Yakuza et d’autres...
Pourquoi ?
Pourquoi cela marche-t-il alors que c’est souvent la même histoire, souvent une histoire de famille bien différente de la notre. Voudrions nous inconsciemment être le fils d’un homme soit tout puissant soit fauché par le destin et une horde d’injustes à la mine effrayante.
Hier j’ai regardé un film, plus tout récent déjà (1995), Dernières heures à Denver avec Andy Garcia, film de gangster ou malfrats, qui ne semble pas plus différents que les autres de sa catégorie. Au bout d’un moment, je me suis rendu compte que ça ne tournait pas rond, du moins pas comme dans un film de gangster classique. Le plus souvent ces personnages vont réaliser des opérations très compliquées avec talent et même grâce pour certains, marquant tel cambriolage ou kidnapping de leur style.
Mais dans ce film c’est l’inverse, une mission qui paraîtrait tellement simple pour Danny Ocean est confié à Jimmy le Saint, ancien caïd repenti dans un business conventionnel et poussif. Cette tête gentille, ce visage même benêt par moments, se voit confier pas un ancien employeur un petit boulot : dissuader une jeune dentiste d’épouser la femme dont le fils du grand méchant est amoureux. Rien de plus simple une nouvelle fois pour Danny ou Takeshi (photo) qui auraient chacun à leur manière réglé le sort du jeune homme. On peut imaginer que le premier aurait fomenté un coup pour que la future mariée retrouve son promis dans les bras d’une autre, le second aurait été beaucoup plus direct et les rotules en auraient souffert.

Au lieu de cela, notre Jimmy décide de reprendre avec lui ses anciens camarades de prison. Pourquoi pour un si petit job ? Notre héros est en fait terriblement humain, comme tout le monde, il a besoin de se sentir épaulé. Il ne se sent pas capable de jouer les super héros, ce ne sera pas dans ce film que l’on verra un combat « un contre tous », même « un contre un », trop incertain. Et voici alors des portraits pas très drôles, qui sentent le camphre, au début cela surprend, et finalement c’est tellement ça. Des personnes prises dans leurs galères de tous les jours qui ne s’amusent que trop peu dans la vie et qui ne se sentent pas exister. Et c’est là, pour en revenir à mon sujet principal, que naît cette envie d’être extraordinaire, de se voir plus beau, plus puissant qu’on ne l’est, de ne pas se laisser dicter quoi que ce soit, de se sentir libre et de choisir sa liberté, pas celle des autres ou qu’on nous met sur le front la majorité passée. C’est pour cela que ces films nous inspirent, les amis de Jimmy le Saint ne rêvent que de ça aussi, des super héros, de ces gangsters toujours tirés à quatre épingles, choisissant leurs frivolités comme s’ils étaient dans un géant self-service à émotions. Ces quatre larrons gagent leur vie rangée pour 10 milles dollars seulement, et oui, dans la vraie vie pas besoin d’avoir des millions sous le nez pour prendre des risques car ce n’est pas cela là la réelle motivation. Ce qu’ils veulent c’est tuer l’ennui (voir mon autre blog).
Les voici tous les 5, sur une route déserte, déguisés en flics, arrêtant le jeune homme, tout devrait bien se passer pour n’importe quel héros de film de bandits que l’on admire, mais là non. Ce n’est pas le cas, ils sont mauvais, pas crédibles dans leur rôles, tout comme moi si je devais m’improviser policier, ils ne sont pas des acteurs, ce sont des gens d’une banalité atroce, ayant chacun récolté un grain de folie de leur séjour en prison, haut lieu de la réhabilitation sociale. Le jeune comprend que ce sont des faux flics, ne veut pas descendre, enchainement grave, insultes, débordement, l’un crac, coup de couteaux. Celui qui devait seulement avoir la frousse pour abandonner sa promise tombe mort. Et jeune femme qui dormait dissimulée à l’arrière du van sort, une balle dans la tête, réflexe non maîtrisé, suffit pour plonger nos 5 amis dans le drame. Ce ne sont pas des héros je l’ai dit, ils finiront tous victime de contrats inéluctables, le grand manipulateur ayant décidé de faire le ménage après cette double bavure. Pas de magie, pas de sensationnel, une réalité dure et poignante. Et ces hommes, nous n’en rêvons pas.
Ils nous font cependant très bien comprendre pourquoi l’on peut passer de l’autre côté de la barrière. On veut se la jouer, c’est exactement ça, être un autre personnage, plus fort certes mais ce n’est pas le principal, tous les héros ont leur faiblesse. Nous voulons tous jouer un personnage qui ne s’embourbe pas dans une vie quotidienne usante et peu surprenante, c’est pour cela que tant de spectateurs comme moi vénèrent des Tony Montana ou Mickael Corleone. Mais des Franky Four Finger nous ne sommes pas et quelque part tant mieux.
Dans tous les cas il faudrait toujours s’épargner un grain de folie dans la vie, pour ne pas prendre le risque de devoir y plonger pour de bon.

mercredi 8 août 2007

Ratatouille

C’est le premier commentaire portant sur le cinéma de ce blog.
Et je choisis en plus une grosse production, un film d’animation. Tout pour me faire hérisser le poil en théorie.
Un rat qui veut être chef, je me suis dis que c’était parfait pour l’été, pour ne pas se prendre trop la tête. Et c’est pas faux, nous sommes loin des dialogues parcellaires et incompréhensibles de certains réalisateurs. Ce film, car maintenant nous ne disons plus "dessin animé" mais bien film d’animation, est une réussite.

Rien à dire, les films de Pixar sont dans le haut du panier et ce Ratatouille ne déroge pas à la règle en remportant avec succès le défi qu’il nous lance dès les premières images, nous ramener en enfance. C’est donc dans un monde avec des gentils et des méchants que nous évoluons, bien content que les gentils en soient des vrais et les méchants aussi, quoique …

Ce petit rat qui gambade et qui se pourlèche les babines (la technique de dessin est exceptionnelle, les plus critiques pourront remarquer avec quelle précision les textures sont rendues, il n’y a que l’eau comme toujours qui n’est pas parfaite, mais les poils de rat !!! du grand art) nous fait voyager dans un paris légèrement kitsch. Heureusement les clichés ne sont pas dérangeants. Ils se limitent à quelques vieilles DS dans les rues ainsi qu’un béret qui a plus pour vocation de souligner le ridicule du personnage qui le porte que de singer cette mode vestimentaire désuète. Pour le reste c’est très réaliste. La cuisine par exemple, on sent qu’ils ont effectué un réel travail de recherche et d’études et on ne peut que les en féliciter. Pour faire le difficile, la complexité et le géni des recettes n’est pas le plus mis en avant, mais ce au profit du géni du rongeur. L’humour est bien présent et est assez fin, très peu de passages ridicules ou burlesques, mais certaines notes discrètes très amusantes. Les attitudes du rat dans son bocal, menacé d’être jeté à la Seine, sont savoureuses. Cela pose une question qui est de plus en plus d’actualité, acteur réel ou virtuel. C’est un débat déjà éculé pour certains, coût et maniabilité des uns contre prestige et bankable ability des autres. Sauf que si on va voir un Bruce Willis, certaines expériences numériques semblent se rapprocher de cela, on va voir un Shrek désormais, ou un Wallas et Gromit. Alors bien entendu nous sommes loin de voir les acteurs en chair et en os disparaître ni même leurs salaires indécents diminuer, mais pourquoi pas imaginer voir des acteurs virtuels apparaître dans différents films, à différents rôles et leur faire de plus en plus de concurrence. On peut très bien envisager que le rat Rémi occupe un second rôle dans un film d’animation de gangsters.

Un film qui doit bien avoir 5 ans aujourd’hui révélait cette problématique, Simone avec Al Pacino. Cette actrice virtuelle, capable mieux que n’importe quel acteur de susciter l’émotion chez les spectateurs. Pour ceux qui ne l’ont pas vu, regardez le, l’idée est pas mal du tout. Et pour Ratatouille, aucune mauvaise surprise, on passe un vrai bon moment.