vendredi 2 avril 2010

La télé à la sauce culinaire

Après avoir parlé de géopolitique et des principaux enjeux de notre siècle voici un enjeu plus léger mais pas moins important car constitutif de notre personne, d’autant plus important pour la majorité des francophones sur la planète, la bouffe.

C’est quand on voyage que l’on comprend que la nourriture a malgré les dernières tendances comme le développement de la junk-food une importance toute particulière dans l’hémisphère. Il en est de même pour certains pays limitrophes comme l’Italie mais pas beaucoup plus.
Dès qu’on s’aventure en terre culinaire hostile on développe après quelques jours un sentiment de malaise, une certaine lassitude et un mal être lié au manque de plaisir procuré par les repas. Si les plus investis veulent bien me permettre ce parallèle, je pense que l’art de la table est bien la première religion et de loin – le nombre de prêcheurs est bien plus important que dans toute autre culture de la foi et si on parle des fidèles, on approche un taux record.
Je ne nie pas le fait que ce trait culturel ne soit pas acquis pour toujours. Comme tout il découle d’une culture, et par nature les cultures sont changeantes. Il est possible que dans 100ans la carte mondiale des amateurs de mets fins ait changé. Mais même si c’est le cas j’ai plaisir à croire que la France restera un pays agréable à vivre, d’un point de vue gustatif j’entends.
Le sujet n’est pas ici de comparer et de confronter différents pays et consommateurs, mais j’aimerais que la tendance de voir disparaître les petits restos au coin des rues où l’on mange bien pour pas cher s’arrête, car pour ce point l’Italie offre de meilleurs possibilités qu’en France, et je ne fais pas ici allusion aux pâtes ou pizzas qui sont des plats par essence moins coûteux.

Quand Fremantle et M6 ont lancé il y a plusieurs années l’émission Un Diner presque parfait, même si sceptiques il y avait, une étude sociologique poussée ne pouvait que montrer un succès potentiel. Et c’est le cas. Je me disais qu’un jour ça finira pas s’essouffler, que les gens en auront marre de recevoir des inconnus à la maison et de se faire une semaine entre inconnus. Mais non, l’amour du bien manger et ce renouveau du contact social mi-imposé fonctionne bien. Avec la disparition de restaurants et de cafés de quartier qui proposaient pour l’équivalent d’à peine quelques euros un bœuf bourguignon ou d’un petit salé, il est moins facile de faire connaissance. Mais cela n’a pas éteint le plaisir de communier autour d’une bonne assiette. On retrouve heureusement cet esprit dans des petits restos disséminés sur le territoire avec chacun leur spécialité, qu’il s’agisse de petit bouchons lyonnais ou d’auberges d’alpage. Mais dans certaines villes importantes, emportés par le train-train cela semble moins évident, et comme une émission salutaire la télé a produit en Un Dîner l’une de ses plus belles réussites.

En faisant malgré tout une overdose et ayant subi la pression indirecte de cette émission derrière mes fourneaux, me mettant à présenter mes assiettes, trouvant de la créativité – sans doute répétant inconsciemment certaines bonnes idées de candidats – je pensais faire un break avec ces émissions culinaires, gardant cependant dès que possible un œil sur la diffusion de Bon appétit bien sur ! et Les escapades gourmandes. Mais un soir rentrant du sport, zappant machinalement comme un animal social de fin de journée vaincu par l’aridité de se lancer dans une tâche intellectuelle, je tombe sur Top Chef. Pas le premier épisode, et en cours d’émission, au départ je me pose des questions sur le déroulement, reconnais des chefs connus comme membres du jury. Je ne décroche pas. Semaine d’après, même schéma, je retombe devant sans trop l’attendre et depuis je n’attends plus que cela avec une certaine excitation. Je suis devenu fan, fan car comme décrit précédemment il s’agit d’une passion universelle – l’art culinaire – que les épreuves sont variées, distrayantes mais jamais dégradantes, et qu’il s’agit d’un concours et non pas d’une télé réalité ou trash tv. Pas besoin de savoir si Brice ou Pierre ont eu des aventures homosexuelles dans leur jeunesse ou s’ils aiment se faire masser le dos après avoir débité un quartier de bœuf. La production ne peut certes s’empêcher d’avoir fait quelques légères incartades en faisant venir des membres de la famille pour un jury ou de passer le stress ou tristesse d’un candidat mais cela reste limité.
Le publique ne juge pas (à ce stade pas encore vu la finale, on ne sait jamais mais cela aurait cependant moins d’impact), ce sont des professionnels, et pas plus ou moins grillés comme ceux de la Nouvelle Star, ayant prouvé des choses de grandes qualités traduites pas de multiples étoiles, qui sont membres du jury et qui surtout font des commentaires objectifs reposant sur une base technique extrêmement solide. Ici pas de candidat chantant évidemment faux se faisant encenser en lui promettant une grande carrière.

La cuisine relève de l’art, c'est-à-dire précision, technique, respect de matières et inspiration, c’est cela qui fait le côté jouissif de voir s’affronter ou collaborer en fonction des épreuves ces candidats, qui sont tous ou presque déjà d’aguerris cuisiniers. Le mixe concours, cuisine, quelques astuces, beauté et projection gustative fonctionne à 100%, du moins pour moi, et c’est pour cela que je suis fan.

jeudi 1 avril 2010

J'ai voté gagnant

Cela ne devient pas une habitude mais je me sens de plus en plus un électeur mainstream. Derrière Sarkozy en 2007, puis derrières les verts aux européennes, j’ai une nouvelle fois été dans la tendance du moment. Je ne suis pas allé voter.

Il y a peu quand je croisais quelqu’un qui n’ allait pas voter je m’énervais assez vite, allais même jusqu’à faire la morale, présentant comme irresponsable le fait de ne pas défendre le droit de vote chèrement acquis par nos ancêtres au prix de révolutions, d’exils et de guerres. Les réserves que j’avais au moment de l’élection de 2007 (voir mes articles relatifs à cette période) se sont intensifiées. Je n’étais pas un oracle mais hélas les craintes évoquées, qui relevaient pour la plupart d’un même constat partagé sur entre autres le danger pesant sur la liberté d’expression, se sont bel et bien réalisées. Dans les émissions politiques on entend les membres du gouvernement se cacher derrière la crise et prêcher pour leur paroisse. Il est vrai qu’il est moins facile de gouverner lorsque les entreprises ferment leurs portes que lorsque les impôts sur bénéfices abondent. Moins de marge de manœuvre certes mais l’occasion de faire évoluer les choses devant la nécessité incontestée.
Hors à part cette stratégie d’effets d’annonce que s’est-il réellement passé que l’on peut qualifier de positif ? Demander aux citoyens de se serrer la ceinture, c’est nécessaire mais on voit aujourd’hui avec la Grèce combien il est difficile de le mettre en œuvre, lorsqu’il semble que ce sont les classes inférieures et moyennes qui vont ressentir seules les effets de ces mesures.

La première chose devant l’évidence de la mauvaise mécanique financière mondiale aurait été de se positionner réellement et fermement en faveur d’une refonte du système, de nationaliser les banques et non pas de leur donner du cash pour qu’ils continuent leurs orgies d’un côté tout en asphyxiant l’économie des PME-PMI, poumon de notre économie, afin de présenter de bons résultats à la bourse. Les bonus 2009 ont été scandaleusement importants mais c’est comme ça, rien n’a changé. Un des derniers prix Nobel de l’économie s’en lamentait encore, évoquant le fait qu’il est sympathique de lui avoir décerné ce prix mais qu’il aurait préféré que les politiques et les cartels bancaires l’écoutent lorsqu’il prédisait la crise avant tout le monde. Je pensais qu’on allait s’attaquer au modèle capitaliste, non pas le détruire mais le faire évoluer, en instaurant des gains financiers à nouveau liés à la création de valeur économique et sociale.

Deuxième point critique, l’environnement, nous ne sommes plus dans l’effet de mode, même si voter Europe écologie reste tendance parmi les bobos qui se gratifieront de ce choix et qui oublieront que parcourir 30 000 kms en avion par an n’est pas très durable et que donner 300€ à WWF ne soulagera rien d’autre que leur conscience.

Ce qui est préoccupant est le manque de réalisme de nos hommes politiques, au pouvoir ou dans l’opposition illustré par l’inconscience de croire qu’un pays seul peut encore influer sur les tendances mondiales. Il est clair qu’il n’est pas possible de décider de taxer un secteur, une pollution ou des bonus sous peine de voir toutes les entreprises se délocaliser en un rien de temps. Dans ce cas ne faire campagne lors des dernières élections européennes que sur des conflits nationaux relève de la pure stupidité. De même que se pavaner avec un ancien mannequin nymphomane à travers le monde ne sert en rien la population. En revanche se démener à faire connaître une parole alternative, des idées non pas nationalistes mais bel et bien intégrant les problématiques globales afin de répondre à ce problème de répartition des richesses et de révolution climatique s’avèrerait plus utiles. Les media auraient un rôle plus important à jouer, mais comme on le redoutait, la liberté de la presse semble de moins en moins garantie, en témoigne le temps médiatique alloué aux personnages du gouvernement depuis l’avènement de Sarkozy. Lorsque je verrai à nouveau un journaliste exploser en vol un homme politique et lui disant ouvertement, vous n’abordez aucun des sujets importants qui peuvent faire évoluer la vie de nos concitoyens, je mets un terme ici à l’interview, j’aurais un peu plus d’espoir dans la liberté d’expression et d’écoute.

Ces éléments et d’autres, mais je m’étais promis de ne plus parler politique, m’ont donc amené comme une majorité de personnes (sur l’ensemble de la population) à ne pas aller voter. Je suis conscient de la gravité de la chose mais n’ai pas de solution, sauf éventuellement plus radicale, pour que les choses s’améliorent (c'est-à-dire, prise de conscience et actions pour régler la polarisation de la répartition des richesses au niveau national et international, des actions économiques et écologiques concrètes et engagées comme celles que nous aurions du avoir dans le meilleur des mondes à Copenhague).
A court terme nous ne pouvons hélas qu’espérer une reprise temporaire de notre système économique pour palier aux manques de clairvoyance des gouvernants des puissances majeures, en croisant les doigts pour que la Terre ou le Soleil nous fasse une petite surprise en contrant l’effet de réchauffement lié à l’activité humaine.