samedi 29 novembre 2008

Petites tragédies et puis au lit

Demain c’est le grand jour, l’annonce d’une première vague de licenciements, une restructuration exigée par la crise. Concept aussi abstrait que terrible dans ses déclinaisons.
Cet imbroglio médiatique n’acquiert une réalité pratique qu’au moment où l’on est touché soi même de près ou de loin par ces décisions stratégiques impitoyables et tout simplement pitoyables.

On prend de l’avance, on essaie de maintenir un cours d’action acceptable, on veut envoyer un message fort, alors on coupe. Tout sera resté secret tout le long, et il faudra la déclaration officielle pour qu’on ose vraiment en parler. Jusqu’au dernier moment des salles d’attente ont hébergé des messes basses bien stressées.
Les meetings étranges se succèdent, les portes sont closes depuis plusieurs jours, les visages sont crispés, burinées par le ressac permanent des exigences économiques. Les yeux ternes, privés d’éclat. Chez certain l’apathie règne en maître jusqu’aux annonces parfois fatales.
Ca peut se passer partout, et ça c’est sans doute passé dans déjà beaucoup d’endroits.
Depuis quelques jours, dans ce quotidien morose les masques tombent autour de moi et je souhaite dénoncer l’inhumanité et la stupidité de bons nombres de petits chefs qui y voient sans doute une occasion de se donner de l’importance.
Je ne veux, et ne vais pas ternir le tableau car malgré des contextes complexes pour certains secteurs, il est quelquefois rassurant de voir que certains chefs, comme le mien aujourd’hui, ont réellement voulu défendre leurs troupes pour ne pas les laisser agonir dans une boucherie chaotique et ensuite les aider à rebondir. Hélas ces personnes ne sont pas forcément légion, et des caractères bien plus glauques se révèlent, bien pire que ce qu’on aurait pu imaginer, faisant payer ces erreurs de management à des personnes qui n’ont eu comme défaut que de croire en des promesses aguicheuses et séduisantes pour rejoindre la société.
De belles promesses, un directeur qui certifie qu’il prend soin de ses gens, que l’humain c’est important, qu’ici pas de quantitatif mais seulement le top de la qualité. Et oui que ne serait-on pas prêt à dire quand on a un turnover en terme d’effectif de près de 80%. Une fois la personne dans les murs, et bien les promesses s’oublient, le contexte est bien différent, la pression portée sur des métriques pas toujours pertinents, les moyens alloués plus que chiches et on fait très vite du low level dans tout les sens.
Le manager dans ces moments est surpris de voir que sa nouvelle recrue ne performe pas aussi bien qu’espéré. Bien entendu ce mauvais manager hypocrite aura oublié que les règles du jeu ont totalement changé pour sa recrue. Et voici qu’une crise se profile, une réduction de 20% de l’effectif et on crie haro sur le baudet. Et comme pour avoir la conscience tranquille notre manager parfaite n’oubliera pas de traiter ce pauvre bourriquet comme le plus vile des voleurs, et le plus criminel des collaborateurs. Sans doute le reflet de l’échec constant de son management pour cette épave dirigeante est insupportable, on escorte la victime comme un criminel, comme le long d’une ligne verte, il ne peut parler à personne, on lui demande ses clés d’accès, comme pour mieux l’emprisonner dans une marginalité rassurante.
Ce pestiféré n’a en somme que ce qu’il mérite. Ah oui, c’est vrai ce pestiféré est aussi humain, il a sans doute une famille, mais quand bien même, cette image d’échec n’est pas supportable pour cette manager vide de tout humanité.
En extrapolant, tirant par les cheveux diront certains, c’est cette lâcheté et cette individualisme qui a permis aux pires régimes d’exister. En entreprise c’est bel et bien la même chose, des managements de la honte et de la terreur coexistent toujours avec des discours enjôleurs, et les agents de cette terreur sont des personnes incapables d’accepter qu’ils peuvent aussi commettre des erreurs.
Tant que les décideurs se complairont d’avoir une vue obscure sur leurs opérations, ces actions se répèteront. Les baronnies locales continueront d’exister et ceux qui trinqueront ne seront que très rarement les responsables de ces mauvaises actions et des mauvais résultats. A croire que rien n’a évolué depuis l’absolutisme.
«Selon que vous serez puissant ou misérable,
Les jugements de cour vous rendront blanc ou noir. »

1 commentaire:

Dead Man Walking... Le cancer de Jack a dit…

"Justice ?! Nik sa mère
Le dernier juge que j'ai vu
Il avait plus de vices
Que le dealer de mon quartier !"

Ce refrain a quasi 20 ans & pourtant il est intemporel. Quand des brêles surstressées se mettent à émettrent des jugements & des sanctions, le terme de justice est bien loin. On a inventé un terme business pour qualifier l'incompréhensible : une décision managériale courageuse quoique douloureuse.

Oui, tu es bon, loyal & la faute m'incombe en tant que manager. Donc tu comprends que c'est toi que je sacrifie ?! Non ?!!! Tant pis, prends toi ça dans la face...