Journal d’avant 40 – 19
Aujourd’hui
j’éprouve une certaine timidité, voire même de la honte. J’écris depuis bientôt
vingt jours de façon quotidienne, et ce, sans me poser trop de questions. Hier
je commençai la lecture d’un livre portant sur la déliquescence de la langue
française. Ce matin je tombe sur un article de Pierre Jourde, pastiche d’un
« quizz » de culture générale de l’été mais ayant comme sujets des
choses bien plus pointues et moins répandues dans les connaissances générales.
Je parviens à un misérable score de 3 sur 27, sauvé notamment par une bonne
connaissance de Fables de la Fontaine et la lecture récente d’un avant-propos
sur la vie d’Eschyle.
Ce n’est pas
brillant. Tout comme mon niveau de français, du coup je suis un peu plus
réservé aujourd’hui. On me dit parfois tu écris bien. Je ne peux
qu’objectivement penser : au royaume des aveugles les borgnes sont rois.
C’est délicat. J’apprécie les lectures de livres classiques, souvent bien plus
que les romans contemporains car il m’arrive très peu de tomber sur des
pépites, notamment en terme de style. D’ailleurs quand on parle de style cela
n’évoque plus grand-chose pour le commun des mortels. C’est soit lisible, soit
illisible. Le concept de plaisir et beauté du style paraît de plus en plus
obsolète. Et pourtant, j’en suis et j’en serai toujours convaincu, c’est le style
qui fait la beauté et la complexité de notre langue qui n’est en effet pas la
plus simple langue sur Terre.
L’on a souvent
tendance à circonscrire le style à quelques auteurs du vingtième siècle (Proust,
Céline, Morand) en oubliant que le Français est une langue de tradition écrite
où la maîtrise parfaite de la grammaire et de la syntaxe était la norme.
Certains disent d’un Balzac qu’il n’avait pas de style. C’est un débat que l’on
peut tenir, mais il écrivait toujours-est-il un Français maîtrisé de qualité.
Sans être capable de le faire moi-même dans l’écriture, et cela tombe bien ce
n’est pas mon métier, l’on peut vite se faire l’idée de la qualité d’une
écriture à la lecture, tout comme pour faire une image (et même plus) un film
peut être réussi grâce à sa mise en scène et à sa photographie. J’ai récemment
souffert en regardant la resucée d’une franchise américaine où rien n’était
joli ni crédible. Le scénario était certes de piètre qualité, mais la
réalisation a sonné le glas de tout espoir. Je reviens à la littérature,
combien de fois n’ai-je pas ouvert un livre qui avait été mis en valeur par un
libraire ou des bandeaux flatteurs employant les flagorneries les plus éhontées
(Splendide ! Brillant ! Du pur bonheur ! Magistral), il ne faut
pas longtemps pour se rendre compte du désastre. Tout n’est pas comme cela,
même si l’utilisation du présent de l’indicatif est la norme pour plus de …
facilité, il y a des langues qui sonnent bien, mais sur le volume pas tant que
ça. J’ai l’impression d’avoir moins de risques, mais aussi moins d’attentes
quand il s’agit de traductions.
Pour résumer,
j’obtiens un score de 3/27, je commets un nombre d’erreurs syntaxiques
significatif, je trouve la plupart des livres modernes médiocres. Seraient-ils
donc bien en dessous de cette médiocrité présumée ? Cela me fait penser au
livre le plus mauvais que j’ai pu lire ces dernières années et qui fut pourtant
mis en avant par la critique, « Bacchantes » de Céline Minard. Ce livre
a suscité chez moi la volonté d’envoyer un email à un site de notation afin de
pouvoir donner un 0 sur 10. En l’état leur site ne permettait pas de mettre
moins d’une étoile et pour ce livre qui m’a fait perdre trois heures de mon
temps c’était bien trop. Ecriture à vomir, histoire débile, personnage plus
grossiers et caricaturaux que les uns que les autres. Le Monde, le Soir,
Télérama, Le Figaro avaient publié des critiques très positives. Rien à dire
sauf naufrage de la civilisation. Il paraît que personne n’ose taper non plus
sur le Yoga d’Emmanuel Carrère alors qu’il serait loupé, d’un autre côté P.O.L.
se félicite d’une première impression à 120 000 exemplaires.
Sur ce à demain.
1 commentaire:
Balzac aurait été recalé 11 fois de l'Académie Française !
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