Journal d’avant 40 – 26
Je faisais un peu
le malin pendant ces semaines à écrire sur tous les sujets et même si j’évoquais
ce prochain passage à l’âge, je m’en protégeais. C’est le dernier billet qui
paraîtra avant le jour de mes 40 ans et cela met un coup tout de même. Bien
entendu nous sommes dans la symbolique pure. Mais on se sert souvent de ses
dates particulières comme des référents ou des paliers futurs.
A 40 ans, je
change de métier, je deviens professeur de lettres ou de philo, je m’engage
dans l’humanitaire, je travaille pour une ONG qui œuvre pour la défense du
climat. Bon bah j’ai peur que dans deux jours je n’ai pas particulièrement
avancé. Alors oui c’est la faute du Covid, bien entendu, car sinon j’aurais au
moins tout fait d’un coup. Ce sont sans doute ces fantasmes qui permettent de
vivre une vie professionnelle où il y a de réelles dissonances. Le monde étant
dissonant, je ne vais pas le démontrer ici, c’est assez logique qu’on le vive à
son échelle. Bien sûr il y a ceux qui sont soit hors monde, soit plus personnels
et qui se soustraient à un schéma répandu et en partie oppressant.
Déjà quand j’étais
petit je voulais être essayeur de fauteuil relax, idée piqué à Gaston Lagaffe
que j’adorais, ayant des fous rires à voir notamment son chat essayer d’attraper
une balle rebondissante. J’avais eu accès à mon premier dossier d’orientation complété
en fin de primaire bien plus tard, et c’est bien ce que j’avais écrit. Et puis
après cette idée non sans intérêt, je me suis dit que prendre sa retraite à 25
ans et arrêter de travailler pouvait être assez sympa.
Aujourd’hui je n’ai
ni fauteuil relax ni économies me permettant d’arrêter de travailler, bien loin
de là. Donc je dois continuer. Continuer dans l’ordre des choses, alors oui il
y a le Covid, une excuse idéale (mais aussi une certaine réalité) pour ne pas
se mettre en danger. Scénariste, j’ai presque essayé, écrivain j’ai presque
écrit un premier livre, journaliste j’ai presque été pertinent, critique
gastronomique j’ai presque voulu créer un guide, œnologue j’ai presque bu assez
de vins. Je suis plutôt Monsieur Presque, presque 40 ans, presque tout, presque
bon en escrime, presqu’intelligent, presque d’à peu près tout. Bon papa je le
suis, époux également, vieux con presque. Vestige d’une conception humaniste de
la société. Perturbé par les évolutions récentes mais presque devenu fervent
écolo. Peut-être que le presque va disparaître avec les 40 ans et que je vais
devenir tout d’un coup, magicien protéiforme en puissance. Je suis curieux de
ce week-end qui débute, hélas sous la pluie, pourtant il faisait beau le jour
de ma naissance, comme quoi. Je me souviens que pour mon fils il faisait très
chaud, enfin pour les critères de l’époque et que pour ma fille il faisait très
froid, ça ne s’invente pas -14° cela fait depuis cette année que nous n’avons
pas eu le même hiver. Et avec cela la chaudière neuve avait lâché. Dans
quelques années on ne se plaindra quand la clim lâchera.
Vous voyez qu’à l’aube
de cette précipitation dans les abysses de la jeunesse, ma capacité à faire des
blagues est extrêmement réduite, la sidération face au temps qui passe. Et puis
une fois digéré je voudrai me prouver que je ne suis pas encore fini, je ferai
des trucs cons, achèterai des habits que la bienséance m’aurait empêché de
porter à 25 ans, j’ écouterai de la
musique de merde mais de jeune histoire d’avoir l’impression d’être dans le
coup. Je serai pour cela accompagné par les enfants qui vont devenir ados, et
qui me rejetteront d’autant plus qu’ils me verront tenter de les imiter. Cela
risque d’être assez drôle. Entre le tragi-comique et l’épanouissement réel. « Mais
va faire du Yoga, ça te fera du bien ». Une fois les 40 passés j’y vais,
et non ce ne sera qu’à peine cliché.
Sur ce à demain
pour le grand jour.
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