Journal d’avant 40 – 13
J’avoue être
assez honteux d’avoir succombé à une polémique ambiante dans mon post d’hier,
mais comme je le disais j’ai tellement souffert d’entendre à longueur de
journée certaines chansons … A ne pas croire surtout que je suis contre la
défense des droits de l’homme (non désolé je suis trop old-school pour écrire
les droits humains) et pas contre la violence. On a souvent tendance à oublier
que nous avons tout de même réussi à faire diminuer les violences générales (je
ne parle pas des violences policières) dans nos sociétés et que c’était pire
avant de ce point de vue là.
J’ai lu la
biographie en BD du boxeur Emile Griffith, champion du monde au début des
années 60, qui avait contre lui le racisme (il était noir, émigré caribéen) et
l’homophobie ( il était gay) l’obligeant à faire comme beaucoup un mariage de
convenance. Cette BD, ou roman graphique de Reinhard Kleist est réellement
percutante, dure, sombre et géniale. Si vous ne connaissez pas cet auteur
allemand vous pouvez foncer sur son Nick Cave totalement halluciné ou son
Johnny Cash. Il a un vrai talent pour montrer la souffrance et la vie de ces
héros. Emile Griffith qui fut affecté par la mort de son adversaire lors d’un
championnat du monde, adversaire qui avait insulté son homosexualité (vidéo du
combat https://www.youtube.com/watch?v=h_7e-WziPJE ) est un héros tragique. La BD suggère
qu’il a frappé sans retenue sous l’effet de l’injure sans pour autant avoir
voulu causer la mort, mais bref le drame était là. Dans ce roman, Emile est
face à sa conscience et au fantôme imaginaire de sa victime et retrace sa vie.
Il y a réellement du génie dans ce schéma narratif. Cela m’a fait penser au
totalement déjanté Nick Cave, où la biographie du chanteur est traitée sous l’angle
des personnages des chansons. On a l’impression d’entrer dans la tête du song
writer au fur et à mesure des pages.
Même si je
commente souvent la littérature, ou le manque de littérature, la BD offre une
approche plus instantanée mais pas moins inintéressante. Honnêtement, la
probabilité que j’achète la biographie d’un boxeur des années 60 à supposer
qu’elle existe est quasiment nulle, alors qu’en BD c’est différent. En plus de
l’histoire, il y a le trait de l’auteur, le découpage et les trouvailles
graphiques qui constituent une bonne partie du plaisir de lecture. Alors certes
je lis le plus souvent des BDs dites indépendantes grâce à mon libraire Denis
qui a su me raccrocher au wagon, lors de ma première, ou plutôt seconde visite
quand je lui ai dit des BDs j’en lisais mais j’ai décroché, j’en pouvais plus
des suites sans fin et des histoires qui n’en finissent pas pour vendre du
tome. Du coup il a vite trouvé et m’a vite orienté vers des choses dont je
n’avais jamais entendu parlé. Chose qu’internet aurait été incapable de faire
(allez en librairie) où je n’aurais que complété des collections et acheté les
coups de cœur jusqu’à l’écœurement. Alors qu’ici du Joe Sacco ça m’a totalement
retourné par exemple, du vrai journalisme d’investigation historique crayonné
et méga détaillé. A lire Gaza, Palestine, et ce Goradze sur la guerre en
Bosnie, à vous trouer le ventre.
Certes il ne faut
pas lire que ce genre de Bds, mais du coup il avait également les propositions
plus burlesques comme ce Mars de Fabcaro et Fabrice Erré avant que le premier
ne devienne la nouvelle coqueluche de Gallimard. C’est un art bien différent et
assez complexe mais qui pour moi revêt un rôle assez unique, celui de me rendre
accessible des mystères de l’histoire ou de l’humanité que je n’aurais que peu
toucher du doigt sinon, en parallèle de se délecter aussi de trouvailles graphiques
et de plaisirs de quelques dizaines minutes à quelques heures (Brecht Evens,
Jon McNaught, David B., Derf Backderf, Burniat, etc …)
Il ne faut pas
hésiter à (même il faut) sortir des séries redessinées et épuisées par les
stratégies marketing et commerciales, c’est parfois encore bien mais bon. Et
pour vous aider à trouver les bonnes choses, rien de tel qu’un libraire.
Sur ce à demain.
L’auteur de ce
billet tient à préciser qu’il n’a reçu aucune commission de la part de son
libraire A fond’ bulles situé Avenue Georges Henri à Woluwe qui est super
génial et a trop de bons conseils et chez qui que tout le monde il devrait
aller – mais n’est pas forcément contre (car quand même avec mes cent mille
lecteurs quotidiens).
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