Histoire de Rien – 6 – Nouvelle - Fiction
Il faut bien que
j’admette certaines choses, le monde paraissait mieux avant. Je ne m’en
souviens certes pas mais vu les apitoiements et plaintes cela ne fait aucun
doute. Pourtant en me penchant sur ce sujet et essayant de comprendre ce
qu’était cet avant, ce n’était pas toujours glorieux. Mes nouvelles fréquentations
semblent ne pas en démordre, ils veulent revenir en arrière. En Belgique les
évènements ont été gérés par un gouvernement provisoire, et pour la rentrée ils
ont réussi à se mettre d’accord avec un Alexandre qui semblaient avoir les crocs.
Et à la stupéfaction de la population, ce même Alexandre semble avoir une dent
contre les restaurateurs leur imposant une fermeture totale malgré le respect
des mesures de protection et de distanciation et le nombre très faible de
contaminés dans le secteur.
Il faut l’appeler
Alexander sans croc maintenant. Je ne vais plus pouvoir aller au restaurant
pour découvrir de nouvelles personnes, déjà que ce n’était pas simple avec
toutes ces barrières physiques. Je pouvais malgré tout découvrir des plats
préparés avec amour, passion et une certaine dose de masochisme. Je me suis
baladé en cuisine quelques fois. Pas longtemps car les étrangers ne sont que
peu souvent les bienvenus, l’hygiène avant tout. Je ne sais pas si ces
gouvernants pensent que les barres de métro sont plus propre que les plans de
travail d’un restaurant. On ne comprend qu’une chose aujourd’hui c’est qu’il n’y
a rien à comprendre. C’est mieux ainsi. Il faut essayer de sortir, de partir vers
des paradis artificiels à la Baudelaire pourquoi pas. Les hommes me font de
plus en plus penser en puissance à ce dormeur du val de Rimbaud, ils ne le savent
pas mais ils sont déjà morts, certes ça fait un peu Ken le survivant aussi
comme phrase. J’ai aussi découvert les vieux mangas, c’est assez drôle Ken,
dans un monde post-apocalyptique, des hommes qui se battent à mort. J’avoue que
ce n’est plus très joyeux, les gens que je croise n’en peuvent déjà plus alors
qu’on leur prédit un confinement proche. Je n’ai que peu d’espoir pour trouver
une nouvelle piste de recherche. On me laisse de côté, parlent de moi dans mon
dos mais sans jamais me nommer. Je ne me sens plus être Rien, mais quelque
chose que l’on n’ose qualifier réellement. Le temps passe, je me demande si mes
parents ne sont pas morts. Il semble que les vieux soient les plus touchés. Et
puis non, ils ne doivent pas être si vieux. Je n’ai aucun souvenir, peut-être n’ai-je
jamais eu de parents d’ailleurs. Suis-je sorti des limbes, suis-je l’enfant des
Erinyes. Je commence à avoir rattrapé mon retard sur la littérature ancienne.
Je ne sais pas ce
que vous en pensez mais ça avait l’air chouette l’antiquité. Certes il ne
fallait pas être du côté des esclaves, un peu comme aujourd’hui. Pour le reste
ils réfléchissaient bien plus qu’aujourd’hui. Enfin c’est ce qu’il en reste,
ils essayaient d’avoir une certain éthique, ils pensaient la vie et la
projetait. Aujourd’hui on ne regarde que dans le rétroviseur, toujours
derrière, on ne veut pas perdre ce qui finalement ne nous plaît pas. Beaucoup
disent que la planète va dans le mur, que la société capitaliste néo-libérale
ne mène qu’à la destruction, vous leur enlevez et ils feraient tout pour y
retourner. Je suis toujours perdu et je ne comprends pas . Si la gestion de la
crise est insupportable, il ne faut pas la supporter et tout faire pour s’y
opposer, sinon il ne faut pas se plaindre. Pas plus compliqué que cela non ?
Les restaurants n’ont qu’à ouvrir, de toute façon ils ne seront pas solvables
pour payer les amendes, de même que tout le monde au bout d’un certain temps. Alors
certains vont me dire qu’il faut garder la tête sur les épaules, pourtant ce n’est
pas donné à tout le monde. Les défenseurs de la liberté d’expression sont
menacés de la perdre à ce que j’ai pu voir. Je ne connais pas encore tous ces
phénomènes, car depuis mon état de mémoire il n’y avait pas encore eu de tel
acte terroriste violent.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire